Les producteurs qui élèvent des poulets sans l’usage d’antibiotiques doivent mettre l’accent sur les oocystes de Eimeria

Article reproduit avec l’autorisation de Poultry Health Today

Par Don Waldrip, D.M.V.
Vétérinaire principal, service technique
Zoetis

Les producteurs de volaille qui élèvent des poulets à griller pour le marché « sans antibiotiques » doivent encore lutter contre l’entérite nécrotique. Or, trop souvent, cela soulève un dilemme éthique : administrer ou non un traitement antibiotique aux oiseaux atteints d’entérite nécrotique si l’entreprise n’a pas d’option de rechange.

Cette situation difficile met en évidence la nécessité de mettre l’accent sur le contrôle des oocystes de Eimeria afin de prévenir la coccidiose, qui va de pair avec l’entérite nécrotique.

Options de programme

La popularité de la vaccination contre la coccidiose s’est fortement accrue dans les dernières années. S’il s’agit de votre méthode de choix pour le contrôle de la coccidiose, faites tout ce que vous pouvez pour obtenir de bons résultats. Par exemple, l’augmentation de l’intensité lumineuse dans le couvoir après la vaccination contre la coccidiose et avant l’expédition à la ferme devrait favoriser le lissage et l’ingestion des oocystes du vaccin. D’ailleurs, certains producteurs trouvent utile de donner une dose de rappel vaporisée sur la litière ou la moulée après le vaccin initial.

Une autre approche possible est d’utiliser la vaccination contre la coccidiose durant les mois plus chauds, lorsqu’il y a généralement moins de risques de coccidiose, puis de passer à des anticoccidiens non ionophores durant les mois plus froids.

Une troisième option pour la production sans antibiotiques est le programme d’alternance biologique, dans le cadre duquel un vaccin in ovo ou à 1 jour est suivi de l’administration d’anticoccidiens non ionophores. À cet égard, des études contrôlées ont montré que cette approche hybride peut réduire l’incidence de coccidiose chez les oiseaux élevés sans antibiotiques, ce qui à son tour entraîne une réduction des lésions d’entérite nécrotique et de la mortalité, et un meilleur indice de consommation1. Comme le moment de la vaccination est extrêmement important, il est préférable d’obtenir les conseils de votre vétérinaire de troupeau, qui peut vous aider à concevoir un plan d’action optimal. Si les anticoccidiens sont administrés trop tôt, ils tueront les oocystes coccidiens du vaccin avant qu’ils circulent dans l’organisme, et les oiseaux ne développeront pas l’immunité nécessaire. En revanche, si le médicament est administré trop tard, l’infection par Clostridium peut se développer et mener à une entérite nécrotique.

Les producteurs de volaille ÉSA qui n’ont pas recours aux vaccins contre la coccidiose doivent se fier seulement aux anticoccidiens non ionophores. Avec si peu d’options dans sa boîte à outils, il est encore plus important de surveiller étroitement la situation au moyen de nécropsies régulières.

Un autre outil pratique est l’épreuve de sensibilité aux anticoccidiens. La surveillance permet une sélection et une rotation de production stratégiques, ce qui aide à préserver l’efficacité des anticoccidiens. L’accès aux épreuves de sensibilité aux anticoccidiens est devenu un peu plus difficile et peut être coûteux pour les petits producteurs, mais, lorsque possible, je recommande fortement d’y avoir recours de manière stratégique.

Taille des oiseaux

Les producteurs qui élèvent des oiseaux ÉSA de plus petite taille peuvent avoir besoin d’alterner les anticoccidiens non ionophores plus souvent pour la simple raison que les fermes qui transforment les oiseaux après cinq à six semaines ont des cycles plus fréquents d’exposition aux agents pathogènes que les exploitations qui élèvent des oiseaux jusqu’à huit à dix semaines.

Néanmoins, les fermes produisant de plus gros oiseaux ÉSA ont leurs propres défis. Dans ces fermes, les oiseaux peuvent vivre plus longtemps que l’immunité acquise des vaccins qu’ils reçoivent à un plus jeune âge contre la maladie de Newcastle, la bursite infectieuse, la bronchite infectieuse et le réovirus. Il peut en résulter une vulnérabilité accrue aux pathogènes. Dans la plupart des cas, la solution est une dose de rappel des vaccins contre ces maladies.

Impact saisonnier

Lors des mois plus chauds, comme la ventilation accrue diminue le risque de coccidiose et améliore la qualité de la litière, c’est un bon moment pour les producteurs de poulet ÉSA d’envisager la vaccination ou un programme d’alternance biologique. Cependant, les médicaments ne peuvent pas tous être utilisés à longueur d’année. Par exemple, la nicarbazine est associée à un stress thermique, particulièrement lorsqu’elle est administrée à forte dose2. Il est donc important de limiter son utilisation aux mois plus froids.

À l’autre extrême se trouve l’hiver, moment auquel les fermes doivent réduire la circulation d’air pour diminuer les coûts énergétiques, et où les troupeaux sont davantage exposés aux agents pathogènes. Une litière plus humide peut également accélérer la sporulation d’oocystes coccidiens dans le poulailler et augmenter la vulnérabilité des troupeaux à la coccidiose et à l’entérite nécrotique. Pour ces raisons, il est essentiel d’augmenter les efforts de contrôle et d’élaborer une stratégie de rotation à long terme à l’aide de tous les outils d’élevage sans antibiotiques disponibles.

Suivi et surveillance

Même si la planification à long terme du contrôle de la coccidiose est toujours bénéfique, vous devriez évaluer l’efficacité en temps réel de votre programme régulièrement pour vérifier si des ajustements sont nécessaires. Des nécropsies ainsi que l’évaluation du rendement des oiseaux vous seront utiles à cet égard. De plus, combiner ces renseignements aux données historiques sur les résultats de nécropsie et le rendement des troupeaux de la dernière année ou des deux dernières années vous aidera à déterminer l’efficacité du produit et vous permettra de faire de meilleurs choix de produits.

L’une des raisons importantes pour lesquelles l’efficacité en temps réel devrait être surveillée au moyen de nécropsies régulières est la « fuite coccidienne », qui survient lorsque certains oocystes de Eimeria survivent au traitement du troupeau par des anticoccidiens non ionophores. Chez les troupeaux de poulet à griller traditionnels traités par des ionophores, une fuite mène au développement d’une immunité contre la coccidiose chez les poulets. Une fuite peut également survenir chez les troupeaux ÉSA traités par des anticoccidiens non ionophores, mais elle s’avère plus difficile à gérer. Le zoalène, un anticoccidien non ionophore dont le mode d’action est semblable à celui d’un ionophore, fait exception et peut être un bon choix pour les programmes d’alternance biologique.

La quantité de fuite qui survient varie selon le produit et la durée d’utilisation. L’industrie a besoin de temps – ainsi que de quelques essais-erreurs – pour apprendre à gérer une fuite coccidienne dans les troupeaux ÉSA, mais les nécropsies visant à surveiller l’état intestinal des oiseaux peuvent indiquer une nécessité d’intervenir et de mettre en place des actions correctives.

Résumé

De nombreuses recherches sont en cours pour explorer l’efficacité potentielle des options de rechange pour le contrôle de la coccidiose, comme les prébiotiques, les probiotiques, les huiles et certains végétaux. Même si certaines options de rechange aux antibiotiques réduisent la production d’oocystes coccidiens, les résultats sur le terrain ne sont pas constants et aucune de ces options ne s’est avérée être le « remède miracle » que les producteurs de poulet ÉSA recherchent. Les recherches sur les options de rechange et les expériences sur le terrain pourraient mener à une solution efficace pour contrôler les coccidies sans médicaments, mais une telle percée est peu probable dans un futur immédiat.

Pour l’instant, les producteurs doivent choisir les bons produits en fonction du coût et du rendement du produit afin de se prémunir contre les pertes, de conserver les produits disponibles pour une utilisation à long terme et d’éviter d’avoir à prendre des décisions éthiques difficiles concernant le bien-être animal.

N’utilisez pas de zoalène chez les pondeuses.

1 Da Costa M, et al. Effects of various anticoccidials as bio-shuttle alternatives for broilers under a necrotic enteritis challenge. 2017 Abstracts, International Poultry Scientific Forum. Atlanta, Géorgie. M43, page 13.
2 Da Costa MJ, et al. Performance and anticoccidial effects of nicarbazin-fed broilers reared at standard or reduced environmental temperatures. Poult Sci. 2017 Jun 1;96(6):1615-1622.